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La cité ouvrière de Noisiel - Les logements

 

Texte : Carina Marrero Leivas

Date : Septembre 2015

Les logements des ouvriers sont considérés comme un des éléments les plus importants dans une company town. Ils sont développés en raison de la concentration de main-d’œuvre d’une usine et de l’intérêt du propriétaire d’avoir ses travailleurs plus contrôlés sur le terrain de l’industrie, donnant lieu au caractère patronal. Selon Dorel-Ferré, « il y a industrie lorsque l’activité est telle qu’elle provoque la concentration d’une main-d’œuvre au point que le logement (spontané ou organisé) devient un signe d’identification du lieu (quartier urbain ou en milieu rural) où se produit cette industrie » [1].

La Chocolaterie Menier a été fondée en 1816 par Antoine Brutus Menier à Noisiel. Au début, l’usine était localisée dans le Quartier du Marais à Paris et était destinée à la fabrication mécanisée de substances pharmaceutiques à base de chocolat. En 1825, elle se déplace à Noisiel. 

Quarante-deux ans après, le fils de Menier décide transformer l’usine en une industrie du chocolat. C’est ici que en 1870 l’ensemble est devenue une company town, avec une grande quantité des ouvriers qui travaillaient dans la fabrication du chocolat et qui se sont installés près de l’usine. 

Après avoir passé par plusieurs propriétaires, presque toujours des descendants de la famille Menier, la chocolaterie est devenue en 1996 le Centre Nestlé France [2]. Des actions de valorisation, qui ont permis de sauvegarder un riche patrimoine industriel, ont été mises en place pour les générations présentes et futures.

Source : https://www.google.fr/maps/
Source de la photo au fond : https://www.google.fr/maps/

Les logements de la Cité Ouvrière Menier à Noisiel

La cité ouvrière Menier à Noisiel, selon Cartier et Jantzen (2001) a été construite en cinq phases. En ce qui concerne les logements ouvriers, dans la première période 1874-1876 ont été bâties 66 maisons. Après, de 1880-1882, 26 maisons ont été finies, de 1890-1895, 53 maisons en plus et entre 1901 et 1911 ont été construites 6 maisons [3]. Le but était de réunir la population des ouvriers de la Chocolaterie près de la production. Avec environ 200 maisons dans 30 ha de terrain [4], la cité disposait de services pour satisfaire la vie quotidienne des travailleurs : une école mixte primaire, une garderie pour les enfants, un centre de santé, une pharmacie, des restaurants, des magasins, une caserne de pompiers, etc. « Cette ville a été considérée comme une cité ouvrière tranquille, où les travailleurs ne connaissaient pas les grèves puisqu’ils habitaient dans de bonnes conditions. 

Les ouvriers de la chocolaterie ont été catalogués comme les plus privilégiés dans le monde ouvrier pour leur qualité de vie. L’avantage principal de cette ville était les logements très confortables et le loyer mensuel, équivalent de deux à six journées de travail en fonction des qualifications de chaque travailleur [5] ».

Dans la cité ouvrière ont été construits trois types de maisons pour les travailleurs, surtout selon leur emplacement dans la parcelle. Les maisons situées au coin étaient différentes du point de vue d’image et d’espace intérieur de celles situées au long de la rue. Il y avait aussi des bâtiments de logements localisés au milieu des mêmes parcelles.

Vue supérieure d’une partie de la cité ouvrière.  Source : https://www.google.es/maps/

Maison du type 1: Maison à deux logements indépendants (destinée aux couples mariés).

Les maisons à deux logements, plus connues comme le pavillon type ont été destinées aux travailleurs qui étaient couples mariés, divisé par un mur mitoyen, qui donnait la possibilité de crée deux logements indépendants. Chaque logement disposait de 64 mètres carrés avec une cave au sous-sol, une salle de séjour, une cuisine au rez-de-chaussée, et deux chambres à l’étage, une plus spacieuse que l’autre [6]. Ce type de construction a été conçu et fabriqué avec un toit à deux versants. Pour cette raison, il y avait un autre étage au grenier. Derrière la maison et accolé à celle-ci ont été construit un hangar composé de toilettes et d’un espace pour faire la lessive.

Les maisons à deux logements étaient structuralement caractérisées par des fondations en pierre et des murs porteurs de briques, poutrelles et solives métalliques. À l’intérieur, les murs étaient revêtus de plâtre et « tapissés de papier peint et parquetées, à l’exception de la cuisine peinte et carrelée [7] ». Le toit à deux versants était formé d’une armature en bois. Pour l’imperméabilisation de la couverture ont été utilisé des tuiles Artois. 

L’eau de pluie était collectée par un système de canalisation avec gouttières et tuyaux de descente de zinc. Selon le guide qui nous a montré la ville, cette eau était aussi utilisée pour les fontaines de la cité. Il y avait, également, un système pour récupérer l’eau des toilettes, qui permettaient aux pompiers de l’utiliser. 

Dans ces maisons ont été prévus des jardins de 300 mètres carrés pour chacune, avec une zone destinée à portager pour compléter la nourriture des ouvriers [8]. Ce jardin avait aussi la fonction d’établir une distance entre les maisons pour permettre l’intimité des habitants. Également, il a été conçu pour l’entrée de la lumière et de la ventilation naturelle, en assurant la qualité de l’hygiène et d’une bonne santé. Cet endroit était aussi utilisé comme espace de récréation pour les enfants. Pour profiter du jardin, l’entrée de chaque logement a été établi à côté, pas directement par la rue, il fallait donc entrer dans le jardin pour accéder à l’intérieur de la maison. 

 

Source de l’identification : Auteur. Source de la photo au fond : http://pone.lateb.pagesperso-orange.fr/les%20maisons%20ouvri%E8res%20de%20noisiel.htm

Chaque pièce de la maison a été conçue avec des ouvertures (portes et fenêtres) pour favoriser le confort intérieur. Presque tous ces éléments ont été construits en forme d’arc avec des platebandes d’un type de brique différent du reste utilisé pour les murs. Les ouvertures, dans les espaces du rez-de-chaussée et de l’étage, sont caractérisées par deux éléments de protection : des fenêtres à deux feuilles en verre avec un encadrement en bois qui s’ouvrent à l’intérieur, et des fenêtres également à deux feuilles de persiennes totalement en bois qui s’ouvrent à l’extérieur. 

Certaines de ces fenêtres ont été conçues avec des rampes en fer pour la sécurité.  Dans le grenier il y avait aussi des fenêtres plus petites avec deux feuilles en verre. 

Pour établir le confort thermique pendant l’hiver, il y avait une cheminée dans la salle de séjour et dans la chambre la plus grande. La cuisine et la chambre des enfants disposaient de placards et le hangar était destiné au fourneau à lessive. Les façades des maisons à deux logements, comme tous les immeubles de la cité ouvrière de la chocolaterie, présentaient des briques apparentes. Dans les façades se sont remarqués des éléments structurels comme les poutrelles et les bords des murs qui limitaient la maison, sans souligner le mur mitoyen, en donnant l'image d'un seul ensemble.

Les maisons d’angle, situées au coin de chaque parcelle, étaient destinées aux employés et aux ingénieurs. Cartier et Jantzen (2001) disent que « l’affectation de ces maisons d’angle plus ordinaires diverge selon les sources : contremaîtres, jeunes ménages, veuves [9] ». Nous pouvons nous rendre compte dans les photos ci-dessous, la différence entre elles, surtout par rapport à l’image urbaine. Ce type de maison était plus grand que les maisons à deux logements, elles possédaient une cuisine, un salon et une salle à manger au rez-de-chaussée, des toilettes à mi- étage, des chambres et un cabinet de toilette à l’étage. C’était également très confortable pour ceux qui les habitaient.

Le système structurel était le même employé dans les maisons à deux logements, avec de fondations de pierre, murs de briques porteurs, poutrelles et solives métalliques. La forme du bâtiment était différente. Pour sa localisation il devait profiter de l’angle. La différence était dans l’image extérieure du bâtiment, avec l’utilisation de divers types de briques, la quantité de fenêtres et la forme de la toiture, ainsi que dans la distribution des espaces intérieurs. Dans ce cas, il y avait également, le système de collecte d’eau de pluie pour les fontaines. Le système de chauffage thermique employé se faisait avec des cheminées dans les grands espaces de la maison.

Maison du Type 2 : Maison d’angle (destinée aux employés et ingénieurs).

 

Maison du Type 3 : Maison à quatre logements (destinée aux célibataires, instituteurs et médecins).

Les maisons du type 3 ont été construites pour répondre aux problèmes de logements. Elles ont été localisées au milieu des parcelles, conçues avec certaines caractéristiques des maisons à deux logements. Ce type de bâtiment étaient composé de 4 logements, qui disposaient également d’un jardin. L’entrée se faisait par un chemin depuis la rue.

Le propriétaire de la Chocolaterie Menier à Noisiel ne voulait pas que les ouvriers achètent les maisons, parce que ça n’était pas rentable pour l’entreprise. Un aspect important, c’est que les Menier pensaient que, si, à la fin les maisons étaient vendues, des personnes étrangères à la chocolaterie pourraient les acheter. Les Menier ne voulaient que de gens liés à l’usine, alors ils préféraient les louer [10]. Malgré ça, les travailleurs de la Chocolaterie Menier ont été bien bénéficiés des avantages de la ville, tant que la cité ouvrière a été présentée à l’Exposition Universelle de 1889 et de 1900 comme un modèle de « libéralité patronale [11]».

 

 

 

[1] Gracia Dorel-Ferré, « Le patrimoine de l’habitat ouvrier, un sujet de recherches : architecture, idéologie et rapports sociaux » (travail publié dans les actes du CRESAT 2005-2006, No. 4, février 2007). 

[2] C. Cartier et Hélène Jantzen, « Noisiel la Chocolaterie Menier. Seine-et-Marne », (Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France, Association pour le patrimoine d'Ile-de-France, 2001), 75.

[3] Cartier-Jantzen, « Noisiel la Chocolaterie Menier. Seine-et-Marne »,, p. 57.

[4] Cartier-Jantzen, « Noisiel la Chocolaterie Menier. Seine-et-Marne », p. 58.

[5] Commentaires du guide pendant la visite réalisée à la Cité Ouvrière de Noisiel, le 7 décembre 2013.

[6] Cartier-Jantzen, « Noisiel la Chocolaterie Menier. Seine-et-Marne », p. 60.

[7] Cartier-Jantzen, « Noisiel la Chocolaterie Menier. Seine-et-Marne », p. 60.

[8] Cartier-Jantzen, « Noisiel la Chocolaterie Menier. Seine-et-Marne », p. 60. 

[9] Cartier-Jantzen, « Noisiel la Chocolaterie Menier. Seine-et-Marne », p. 62.

[10] Commentaires du guide pendant la visite réalisée à la Cité Ouvrière de Noisiel, Máster Erasmus Mundus TPTI, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, France, 7 décembre 2013.

[11] « 1874 : Construction des premiers logements de la cité ouvrière des usines Menier à Noisiel », dans Archives départementales de Seine-et-Marne, s. d, accès le 8 juin 2015, http://archives.seine-et-marne.fr/1874-construction-des-premiers-logements-a-noisiel.

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